(Photo: Couverture de l’album « Père Noël Mes Fesses! », Thierry Lenain, illustrations de Bruce Roberts, Les 400 coups,©2008. Coll. Carré blanc.)
J’ai toujours eu un rapport conflictuel avec les cadeaux.
Je crois que ce dont j’ai le plus souffert, enfant, c’était de sentir que ma mère n’a jamais été vraiment heureuse. Ce n’est peut-être que ma perception d’enfant, mais si ma perception était fausse, mes parents n’ont pas réussi la corriger. J’ai donc grandi avec la lourdeur de sentir ma maman insatisfaite et triste. Il y a bien eu quelques moments de joie et de plaisirs. Mais le vrai bonheur, durable, solide… je n’ai jamais eu cette impression.
Toute petite, je pense avoir songé quelques fois que mes parents auraient été plus heureux si je n’avais pas été là. Ce n’était pas une pensée rationnelle, mais un sentiment diffus, et possiblement constant. La vie leur semblait bien difficile, et leur quotidien était un combat (les factures à payer, la nourriture à mettre sur la table, les obligations, les responsabilités, les nombreux conflits…). Je pensais : « Si je n’étais pas là, maman aurait moins de soucis. Si je n’étais pas là, maman pourrait partir. Si je n’étais pas là, maman pourrait se payer cette robe, maman pourrait sortir, maman pourrait acheter ce qui lui fait envie, décorer à son goût, maman et papa auraient plus de temps ensemble, ils sortiraient, leur vie amoureuse serait donc plus facile… »
Mais la pauvreté m’avait aussi rendue très envieuse des autres enfants. Et je passais des heures le nez dans le catalogue Distribution aux Consommateurs, en particulier dans la section des jouets. J’en étais arrivée à croire que le bonheur était dans le matériel : les autres enfants avaient plus de jouets que nous et semblaient plus heureux, donc je voulais « avoir » moi aussi. « Avoir » me rendrait certainement heureuse.
Dans un tel contexte, j’étais tiraillée entre ma joie de recevoir un jouet, et ma gêne à l’idée que mes parents avaient dû faire des sacrifices pour me l’offrir, ce qui aggravait leurs difficultés financières et me rendait malheureuse. Souvent, en recevant un cadeau, j’étais prise d’une émotion qui me serrait la gorge et faisait monter mes larmes. On m’appelait « la sensible ». Cette étiquette m’a suivie longtemps. On en concluait que j’étais très reconnaissante de mon cadeau, puisque j’étais si émue. Mais c’était plus déchirant que ça. Si votre enfant pleure souvent quand vous lui faites un cadeau, posez-vous quelques questions…
À la longue, j’ai développé un rapport conflictuel avec la notion même de cadeau. Le matériel avait pris dans ma vie une importance trop grande: il y avait la fascination (« si j’avais cet objet, je serais plus heureuse! »), puis la jalousie en voyant les autres enfants qui en avaient plus, puis l’amour que l’objet était supposé symboliser (« si je reçois cet objet, c’est qu’on m’aime »), mais aussi, il y avait les difficultés, les soucis associés à la quête de ce matériel, le sacrifice qu’il supposait de la part de mes parents, et en conséquence de ce sacrifice, une sorte de sacralisation de l’objet (« tu dois en prendre soin car tes parents se sont sacrifiés pour que tu l’aies! ») qui menait à une sorte d’anxiété à l’idée de le perdre ou de le briser…
Ce matérialisme me pesait.
21 ans
J’avais 21 ans et j’étais en appartement avec mon amoureux de l’époque. Un jour, en ouvrant le divan-futon, mon copain a accidentellement fait tomber la base en bois sur ma petite lampe de chevet, que je gardais depuis ma plus tendre enfance, et à laquelle je tenais beaucoup. Elle s’est fracassée et j’ai fondu en larmes. Une peine immense, une peine avec des hoquets et des spasmes, comme une toute petite fille. Mon copain était tout bouleversé de ma réaction, tout penaud.
Puis c’est arrivé, comme ça, en un claquement de doigts. Clac! J’ai arrêté de pleurer, net. J’en ai eu marre. J’ai décidé, sur le coup, que le matériel n’aurait plus autant de pouvoir sur moi. Je venais de décider de m’en libérer. Mon copain Robert nageait en pleine confusion: en quelques secondes, j’étais passée d’un état de détresse toute enfantine devant ma petite lampe de céramique en morceaux, à cette détermination soudaine et à cette résolution que je lui annonçais avec aplomb : « C’est pas grave, je viens de décider que ce n’est plus important pour moi. C’est juste une lampe. C’est fini, je vais bien. ». J’ai mis les morceaux de ma défunte lampe à la poubelle. Affaire classée.
Le matériel avait toujours eu beaucoup trop de pouvoir sur moi, et c’en était fini. Je revendiquais ma libération du matérialisme. Ça tient toujours, trente ans plus tard.
Rituel sacré
Il était naturel pour moi, une fois devenue mère, de faire tout mon possible pour éviter de léguer en héritage à mes propres enfants cet esclavage du matérialisme. Pour cela, il fallait éviter à tout prix qu’ils ne prennent la mesure de mon amour pour eux en regard du nombre des cadeaux que je leur ferais.
Et quand je parle de « cadeaux », je veux dire ici l’objet dans sa boîte, emballé dans du beau papier et offert avec déférence et cérémonie. Ce rituel quasi-sacré.
Ôter du pouvoir au matériel dans la vie de nos enfants a été grandement facilité par le fait que nous ne leur avons jamais fait croire au père Noël. Aucune ambiguïté : ils savaient d’où venaient les cadeaux.
À nos enfants, nous avons surtout offert des cadeaux qui ne s’emballent pas dans du papier-cadeau : des activités, des sports, des sorties, un spectacle, un enrichissement, une expérience, un cours, un camp de vacances, un voyage, un party avec les copains, une soirée de jeux de société… bref des cadeaux dématérialisés qui pouvaient enrichir leur expérience de vie. Cette habitude a contribué à désacraliser la fameuse séance de déballage des cadeaux, le jour de Noël (idem pour les anniversaires). La séance de déballage était ainsi réduite au minimum, ce qui lui ôtait une bonne partie de sa puissance évocatrice. Nos enfants ont tout de même déballés des cadeaux quand ils étaient petits, mais en nombre réduit, et ça durait beaucoup moins longtemps. Et c’était moins cérémonieux.
La symbolique de la séance de déballage des cadeaux, le jour de Noël, avec l’émerveillement, devant les nombreux paquets sous le sapin, et les couleurs, les choux, la beauté de la scène avec le sapin décoré, les lumières, les décorations de Noël, l’excitation frénétique, et le crounch crounch du papier d’emballage, les OHHHHH! et les AHHHHH! et les rires, les photos-souvenirs, bref toute la symbolique de ce moment contribue directement à la fascination que l’objet exercera sur nos enfants, et à l’importance que prendront ces objets dans nos vies. Car toute cette mise en scène, sous le couvert de la joie et du beau moment en famille, n’a pour issue que de nous faire déballer les paquets-cadeaux, et donc, le focus, le moment culminant, le summum de l’extase, c’est l’objet, quoi qu’on en dise pour tenter de se déculpabiliser. L’objet est le cœur de ce moment. La puissance évocatrice du matin de Noël, cette frénésie, qui s’inscrit trop profondément dans les souvenirs marquants de l’enfance, contribue à notre attachement démesuré aux choses, aux objets, aux cadeaux, et à leur charge émotive. Je crois que l’emphase mise sur ces séances de déballage de cadeaux de Noël, sous le couvert des bonnes intentions (i.e. leur faire vivre un moment fort et merveilleux) contribue à fabriquer, à la chaîne, de futurs gros consommateurs compulsifs, qui chercheront à reproduire, en achetant, les émotions les plus fortes de leur enfance.
C’est pourquoi, pour exprimer notre amour à nos enfants, nous n’avons pas misé sur l’objet. Notre amour se manifeste par le soin que nous mettons à leur éducation, à leur alimentation, à leurs loisirs, à l’enrichissement de leurs expériences de vie, à nos interventions auprès d’eux, à leur parler, à jouer avec eux, à leur manifester notre tendresse par le geste et la parole, à considérer avec beaucoup de sérieux tout ce qui les concerne, à placer leur intérêt au centre de nos préoccupations, à prendre plaisir à leur compagnie, etc. Ils l’ont toujours senti, et on le leur rappelait souvent. Ils n’ont pas attendu que les cadeaux les rassurent. Je crois que tout cela a aidé à en faire des êtres libres des chaînes de la surconsommation.
Bon et bien je suis heureuse d’avoir grandi dans ma famille . Le rêve c’est se qui a permis de grandes découverte et qui a amener l’Homme plus long . Et pardon Noël n’est pas que négatif . C’est le moment de l’année où les familles se rencontrent avec cousins, cousines ,oncle ,tantes et grand-parents . Offrir un présence n’est pas qu’une affaire ou on partage des « debelles « inutiles. C’est un échange , un don de soi qui permet de développer l’empathie , la compassion et oui parfois le sacrifice de quelque chose. Ce sont tant qu’à moi des valeurs d’une grande importance . Il faut parfois offrir et pas toujours recevoir . Et de la magie , de la féérie ,du fantastique il hésitait de mon temps avec Blanche-Neige , la Belle -au -bois dormant , Hensel et Gratel . Et saviez-vous que ces contes apportent aux enfants le travail de leurs émotions .C’est pourquoi ils nous demandent de leur lire inlassablement le même conte jusqu’à la maîtrise du dit sentiments .
Donc pour moi ,vive le Père Noël , la fée des dents et tous les autres parce que je trouve que les enfants ont grand besoin de magie avec la vie de fou qu’on leur fait subir en devant être performant dans tout . Ça pour moi c’est beaucoup plus dangereux que le Père Noël . Anxiété , stress , et les médicaments ne sont pas générer par les personnages féériques mais par ceux qui sont derrière eux , les adultes .
Et pour ce qui est de la théorie du mensonge ….ma marraine à qui j’ai retrouné la question à 7 ans m’a répondu -qu’est-ce que tu en penses . -Je ne crois pas non. Alors elle m’a répondu….le Père Noël est dans chacun de nos cœurs . Lorsque tu offres avec ton cœur quelque chose à quelqu’un tu deviens le Père Noël. J’ai compris à ce moment . Et quel bonheur j’ai ressentie en sachant que moi aussi j’étais un petit bout de Père Noël. Je pouvais fabriquer des choses pour ceux que j’aimais .Mes parents ont gardé chaque carte fabriqué de mes mains jusqu’à leurs morts .Quelle merveilleuse leçon . Je ne l’ai jamais oublié et il y a de ça 48 ans .
Contes: histoires qu’on raconte sans avoir à mentir.
Père Noël: mensonge.